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Conclusions du Forum des ONG

Espace d’interaction entre la société civile et la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, le Forum des ONG s’est tenu en ligne du 10 au 12 novembre 2021, juste avant la 69ème session ordinaire de la Commission Africaine.

Lors de la dernière session de l’année intitulée « 40 ans de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples – La voie à suivre pour bâtir l’Afrique que nous voulons », le Forum des ONG s’est penché sur l’évolution de la protection des droits humains sur le continent grâce à l’application de la Charte Africaine depuis son adoption en 1981.

Situation des droits humains en Afrique

Grace Endalle, membre du Réseau des défenseurs des droits humains en Afrique centrale (REDHAC), a dénoncé la dangereuse restriction de l’espace civique au Congo, en République démocratique du Congo et au Cameroun, où l’on déplore de nombreuses arrestations arbitraires, des violences policières et l’infliction de traitements inhumains. Il a été recommandé que ces États adoptent des mesures plus fermes en faveur de la protection de la démocratie et de la gouvernance en alignant leurs pratiques sur la Charte Africaine.

La même recommandation a été faite aux États d’Afrique de l’Est où les différents conflits en cours, notamment dans la région de la corne de l’Afrique, rendent l’accès à l’espace civique périlleux voire impossible. Il a également été recommandé que ces États mettent fin au harcèlement généralisé des défenseur.es des droits humains et assurent leur protection.

En Afrique du Nord, Naji Moulay Lahsen, membre de la Commission indépendante des droits de l’Homme en Afrique du Nord, a signalé que le droit à la liberté de réunion et d’association était fragilisé, et que l’impunité régnait dans la région. En Algérie, en Libye et au Maroc, les défenseur.es des droits humains qui dénoncent des violations subissent des représailles. En Tunisie, les activistes LGBTI sont victimes d’arrestations et de mises en détention arbitraires. Il a été recommandé que les pays d’Afrique du Nord respectent leurs obligations régionales et veillent à ce que le droit à la liberté de réunion et d’association soit protégé sans conditions.

En Afrique de l’Ouest, les coups d’État au Mali et en Guinée ont contribué à créer un climat hostile envers la société civile et peu favorable à la défense des droits humains. En revanche, du fait de la pandémie, le Bénin a libéré 411 prisonniers et modifié son cadre juridique en faveur des personnes handicapées. Les avancées en matière de droits humains restent toutefois limitées dans le pays. Le bilan du Bénin dans ce domaine sera examiné lors de la 69ème session de la Commission Africaine.

En Afrique australe, on déplore différentes violations des droits humains en Eswatini. Le gouvernement du pays s’est attribué les pleins pouvoirs, désormais passant outre les pouvoirs judiciaire et législatif. En Namibie, bien que les efforts déployés par le pays pour coopérer avec la Commission Africaine aient été salués, des préoccupations demeurent quant au rôle de l’Ombudsman dans le processus législatif et à la persistance des lois anti-LGBT. Le bilan en matière de droits humains de ces deux pays et des Seychelles sera examiné dans le cadre de la 69ème session de la Commission Africaine.

Les 40 ans de la Charte Africaine et le contraste entre les dispositions de la Charte et la réalité sur le continent, et la pandémie de COVID-19

La Charte Africaine a été unanimement reconnue comme ayant joué un rôle déterminant dans la promotion et la protection des droits humains sur le continent, en particulier par le biais de l’établissement de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples et de nombreux autres protocoles. Cependant, malgré les progrès réalisés jusqu’ici grâce à la Charte, les participant.es ont rappelé que la violence et l’hostilité envers les droits humains demeuraient très présents dans la majorité des pays africains et constituaient un défi permanent. Ceci s’explique en partie par le fait que l’application de la Charte est laissée au bon vouloir des États. Par ailleurs, l’instabilité politique, le manque de démocratie et la corruption croissante, la résurgence des coups d’État, les problèmes socio-économiques et les nouveaux défis liés à la crise environnementale sont autant de facteurs qui ralentissent la pleine réalisation des dispositions de la Charte.

La persistance des effets de la pandémie de COVID-19 sur la société civile, déjà abordée lors de la session d’avril 2021, est toujours problématique et le Forum a mis en avant les graves effets des mesures de lutte contre la propagation du virus sur l’accès déjà compliqué à l’espace civique et les violations des droits humains qui en résultaient. En effet, la plupart de ces mesures sont disproportionnées au regard des objectifs qu’elles sont censées remplir et l’on soupçonne que certains États s’en servent comme prétexte pour surveiller la population. Le Forum s’est notamment penché sur l’impact social de ces mesures sur les populations qui travaillent dans le secteur informel comme la communauté LGBTI, les travailleurs et travailleuses domestiques, les migrant.es, les réfugié.es et les personnes déplacées. Les répercussions de la pandémie sur les droits des jeunes ont également été abordées, notamment la fermeture des établissements d’enseignement et la coupure de l’accès à Internet dans plus de 25 pays africains qui ont sévèrement affecté la participation de la jeunesse à la société. Les organisations de la société civile ont fait valoir que, dans ce contexte, il était plus important que jamais que les États se conforment aux dispositions de la Charte pour éviter les violations de droits. À cette fin, le Forum a adopté une résolution relative à la reprise après la pandémie conforme à la Charte Africaine qui sera présentée lors de la 69ème session de la Commission Africaine. L’objectif de cette résolution est d’établir un précédent afin d’empêcher la prise de mesures abusives et répressives à l’avenir.

L’accès aux vaccins demeure compliqué

L’accès aux vaccins reste très inégal sur le continent : certains pays comme les Seychelles et le Maroc ont vacciné plus de la moitié de leur population tandis que d’autres comme le Soudan du Sud, le Cameroun et le Congo ne comptent que 1 % de personnes vaccinées. Le Forum des ONG a cité plusieurs causes à ce problème : la gestion de la distribution des vaccins, fortement influencée par des intérêts diplomatiques et politiques ; les problèmes de sécurité nationaux et régionaux qui ralentissent voire empêchent l’accès à la vaccination ; le manque de fonds et de campagnes de sensibilisation consacrés à la vaccination ; et le manque de connaissance de la réalité du terrain des fabricants de vaccins.

Pour remédier au problème, le Forum a voté une résolution portant spécifiquement sur le besoin urgent de mettre en place une distribution plus équitable des vaccins en Afrique et une autre portant sur la reprise après la pandémie qui désigne la vaccination comme seul moyen de revenir à la normale.

Résolutions relatives à un pays particulier :

Résolution sur la situation des droits humains en Eswatini

Résolution sur la situation des droits humains au Soudan

Résolution sur la situation des droits humains au Nigéria

Résolutions thématiques :

Résolution sur la protection des droits des personnes LBGTI

Résolution sur le besoin urgent d’un accès équitable à la vaccination contre la COVID-19 en Afrique

Résolution sur les migrant.es et les travailleurs et travailleuses domestiques en Afrique

Résolution sur la protection de l’espace civique et des droits humains au cours des 40 prochaines années

Résolution sur la reprise après la COVID-19

Recommandation :

Recommandation sur la situation des réfugié.es, des demandeurs et demandeuses d’asile et des apatrides

 

Vous pouvez accéder à l’enregistrement des sessions ici.

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