Commissioner Mudford Zachariah Mwandenga reading decisions on the granting of observer status.

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CADHP 77 : La Commission africaine octroie le statut d’observateur à neuf ONG et rejette cinq demandes

Lors de sa 77e session ordinaire, la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples a accordé le statut d’observateur à neuf organisations non gouvernementales. Elle a par ailleurs rejeté cinq demandes, dont quatre au motif que les organisations concernées ne disposaient pas de bureaux en Afrique.

Lors de sa 77e session ordinaire qui s’est tenue à Arusha, en République-Unie de Tanzanie, du 20 octobre au 9 novembre 2023, la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples (Commission africaine) a examiné 14 demandes de statut d’observateur soumises par des organisations non gouvernementales (ONG) travaillant dans le domaine des droits des personnes et des peuples en Afrique. Sur les 14 demandes examinées, neuf ont été acceptées et cinq ont été rejetées. Deux motifs de rejet ont été invoqués : un statut juridique ambigu pour l’une des organisations et l’absence de bureaux au sein des États de l’Union africaine pour les quatre autres. 

Diversité des ONG ayant obtenu le statut d’observateur

Les neuf organisations qui ont obtenu le statut d’observateur travaillent dans des domaines des droits humains très divers. Basée en Ouganda, la National Coalition of Human Rights Defenders est la seule organisation travaillant directement sur des questions liées aux défenseur·e·x·s des droits humains (DDH). Elle a obtenu le statut d’observateur après deux échecs successifs. La Coalition a pour mission d’appuyer le travail des DDH dans tout l’Ouganda et d’améliorer les mécanismes qui les protègent. Elle s’efforce également d’apporter une réponse collective aux menaces reçues par les DDH et de sensibiliser le public au travail et à la situation des DDH en Ouganda. Les huit autres organisations sont l’Institut Afya na Haki (Ouganda), le Centre d’Espoir pour les Droits de l’Homme (République démocratique du Congo), le Consortium of Ethiopian Human Rights Organisations, l’African Centre for Justice and Peace Studies (Soudan), le Forum for African Women Education (Kenya), le Forum for Development and Human Rights Dialogue (Égypte), Un Monde à Venir (Cameroun) et Well-Being Africa (Afrique du Sud). 

Motifs des refus

Quatre des cinq organisations dont les demandes ont été refusées sont basées aux États-Unis, au Royaume-Uni et aux Pays-Bas, et n’ont pas de bureaux en Afrique. Il s’agit d’ADF International, de l’International Network of Economic, Social and Cultural Rights, de la GAIA Foundation et du Transatlantic Christian Council. La Commission africaine a rappelé que la « décision » de refuser le statut d’observateur aux organisations qui n’étaient pas implantées en Afrique avait été prise lors de sa 35e session extraordinaire, organisée en Gambie en avril 2022. Cette « décision » ne figure pas dans le communiqué final publié par la Commission, ce qui laisse les ONG déboutées perplexes. La pratique relative à l’octroi du statut d’observateur aux ONG est normalement régie par le Règlement intérieur de la Commission africaine et la Résolution sur les critères d’octroi et de maintien du statut d’observateur aux organisations non gouvernementales chargées des droits de l’Homme et des peuples en Afrique adoptée en novembre 2016. Elle vise à renforcer la participation des ONG au travail de la Commission dans la volonté de consolider la démocratie participative et le développement durable sur le continent. Aucun de ces deux instruments juridiques n’exclut les organisations qui n’ont pas de bureaux sur le continent pour autant qu’elles œuvrent en faveur de la promotion et de la protection des droits humains en Afrique.

« Même si la “décision” de la Commission peut se justifier, elle semble contraire au principe de certitude juridique exigeant que les décisions soient prises conformément à des règles juridiques établies et que les individus puissent prédire l’issue de leurs requêtes sur la base de ces règles », a déclaré Trésor Muhindo Makunya, juriste et chargé de plaidoyer pour l’Afrique auprès d’ISHR.

Demande de clarification

Pour assurer le respect des principes de certitude juridique et de prévisibilité, la Commission doit clarifier le contenu et la nature de cette « nouvelle » exigence. Elle contribuera ainsi à favoriser la participation des ONG à ses travaux.

Les ONG ont porté des cas historiques devant la Commission. Elles ont mené des initiatives ayant permis l’élaboration d’instruments tant contraignants que non contraignants et ont appuyé les membres et les mécanismes de la Commission dans l’exercice de leur mandat de promotion auprès des États parties. Pour appuyer cette collaboration, la Commission doit adopter une démarche inclusive et baser l’octroi du statut d’observateur sur des critères préétablis et connus de toutes les parties prenantes, particulièrement les ONG.
Adélaïde Etong Kame, responsable de programme pour l’Afrique auprès d’ISHR.

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