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Afrique

CADHP77 : Les défenseur·e·x·s de l’environnement demandent à la Commission africaine de mieux les protéger

La Coalition mondiale pour le droit à un environnement sain a appelé la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples à élaborer un accord sur les droits environnementaux afin de renforcer la participation du public et de mieux protéger les défenseur·e·x·s des droits environnementaux.

Le 21 octobre 2023, la Coalition mondiale pour le droit à un environnement sain, dont ISHR fait partie, a organisé un événement parallèle en marge de la 77e session ordinaire de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples (Commission africaine).

Les personnes présentes ont partagé des informations sur ce mouvement qui œuvre en faveur de l’élaboration d’un cadre juridique pour les droits environnementaux en Afrique. Elles ont présenté les leçons apprises et ont cherché à élargir le soutien apporté au mouvement. Joseph Burke, chef de l’Universal Rights Group pour l’Afrique, a souligné les quelques progrès réalisés à l’échelle mondiale en matière de protection de l’environnement, tels que la Déclaration de Nairobi et l’Appel à l’action des dirigeant·e·x·s africain·e·x·s sur le changement climatique, l’Accord de Paris et l’Accord régional sur l’accès à l’information, la participation du public et la justice en matière d’environnement en Amérique latine et dans les Caraïbes (Accord d’Escazú). Toutefois, les défenseur·e·x·s des droits environnementaux continuent de se heurter à d’importants obstacles dans l’exercice de leurs activités. Selon l’ONG Global Witness, en 2022, un·e·x militant·e·x écologiste a été tué·e·x tous les deux jours, tandis que le reste des défenseur·e·x·s de l’environnement ont été victimes de violence, de harcèlement et de criminalisation. Dans sa déclaration devant la Commission africaine, ISHR a rappelé cette inquiétante situation observée sur tout le continent africain.

Absence de reconnaissance des droits des communautés autochtones

Deux participantes ont évoqué la protection des droits environnementaux et la participation du public au Kenya et en Tanzanie. Emily Kinama, chargée de recherche et avocate associée à l’Institut Katiba, a expliqué qu’il n’existait pas de lois relatives aux droits environnementaux au Kenya. Les organisations de la société civile ont recours à des actions en justice collectives pour contester les lois qui criminalisent les défenseur·e·x·s de l’environnement et des droits fonciers, mais ces actions sont parfois enrayées par l’engagement de poursuites stratégiques contre la mobilisation publique. « Les droits des populations autochtones ne sont pas reconnus malgré l’arrêt rendu par la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples dans l’affaire Ogiek, qui réaffirme l’obligation du Gouvernement kényan de les promouvoir et de les protéger. Six ans après, cet arrêt n’est toujours pas mis en œuvre par le Kenya», a expliqué Mme Kinama. Elle a conclu en déclarant que le Kenya devait continuer à reconnaître les droits des populations autochtones, à adopter des lois et des processus réparant les injustices passées et à garantir la participation des populations autochtones à la protection de l’environnement, à laquelle elles contribuent depuis des temps immémoriaux. 

Intérêt d’une participation inclusive

Dans sa présentation, Miriam Tikoine de la Maasai Women Development Organization a souligné la nécessité d’impliquer les Massaïs et d’autres communautés pastorales dans les débats sur l’environnement et le changement climatique, et de les sensibiliser aux questions environnementales afin de leur faire comprendre l’importance de la protection de l’environnement.

Les agriculteur·rice·x·s devraient être formé·e·x·s pour faire face aux problèmes liés au changement climatique et adapter leurs pratiques agricoles ; les jeunes, les chefs traditionnels et les femmes doivent comprendre les questions liées aux crédits carbone afin de pouvoir agir. Si tout le monde n’est pas impliqué, le changement climatique et les préoccupations environnementales resteront l’affaire de quelques personnes seulement.
Miriam Tikoine, Maasai Women Development Organization.

Actions en justice liées aux droits environnementaux

Rémy Ngoy Lumbu, Rapporteur spécial sur les défenseurs des droits de l’Homme et point focal pour la question des représailles en Afrique, a appelé les États à renforcer l’éducation en matière de droits humains et environnementaux et la transparence, et à davantage responsabiliser le secteur minier afin d’éviter la signature de contrats inéquitables qui ne bénéficient qu’aux entreprises et sacrifient les intérêts et les droits des générations actuelles et futures.

Les défenseur·e·x·s des droits environnementaux s’opposent à ces types de contrats et aux pratiques des États et des entreprises qui mettent la planète en danger. M. Lumbu a déclaré que leur rôle essentiel avait été reconnu par la Commission africaine qui avait justement mis en place ce mécanisme pour rappeler leurs obligations aux États, envoyer des lettres d’appel urgent ou publier des communiqués de presse lorsque des défenseur·e·x·s de l’environnement sont en danger. Les ONG doivent appuyer ces efforts en engageant davantage d’actions en justice auprès des instances nationales et africaines des droits humains.

Nous ne recevons pas suffisamment de communications sur les problèmes liés aux droits environnementaux. Les ONG doivent contester les comportements nuisibles des États devant la Commission africaine ou la Cour africaine. Si 40 ONG décident de prendre en main une affaire chacune, 40 affaires liées aux droits environnementaux pourront être portées devant la Commission africaine en un an.
Rémy Lumbu, Rapporteur spécial sur les défenseurs des droits de l’Homme et point focal pour la question des représailles en Afrique auprès de la Commission.

Nécessité de mettre en place un instrument pour les droits environnementaux

La Coalition a appelé le Rapporteur spécial et la Commission africaine dans son ensemble à appuyer l’élaboration et l’adoption d’un instrument de défense des droits environnementaux.

Les activités des entreprises retentissent sur la vie des populations, les conduisant à la pauvreté. En tant qu’organisations de la société civile, nous avons pris conscience de la nécessité de protéger nos ressources et notre planète, ainsi que les personnes qui risquent leur vie pour les défendre. Les défenseur·e·x·s des droits environnementaux sont en première ligne et, de ce fait, sont victimes de violations de leurs droits et d’exécutions arbitraires. Face à l’arrivée massive d’entreprises en Afrique, nos ressources et les personnes qui veillent sur elles doivent être protégées par un instrument juridique adapté, comme c’est le cas dans d’autres régions.
Alfred Brownell, directeur général, Green Advocates.

Le Rapporteur spécial s’est engagé à appuyer une proposition de résolution auprès de la Commission africaine afin de lancer le processus d’adoption d’un instrument consacré aux droits environnementaux.

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