Le 23 mai 2024, le Rapporteur spécial de la Commission africaine sur les défenseurs des droits de l’Homme et point focal sur les représailles en Afrique, M. Rémy Ngoy Lumbu, a présenté son rapport d’activité lors de la 79e session ordinaire de la Commission africaine qui s’est tenue dans un format hybride du 14 mai au 3 juin.
Dans son rapport, M. Lumbu a expliqué avoir effectué, en novembre 2023, avec le soutien d’ISHR, une visite au Sénégal pour plaider en faveur de l’adoption d’une loi pour les défenseur·e·x·s des droits humains au sein du pays et a appelé à ce que ce type d’initiative soit renouvelé dans d’autres pays n’ayant pas encore promulgué de loi dans ce domaine. Il a également indiqué avoir effectué une visite informelle en République du Cameroun en 2024 et avoir participé à la consultation sur le lancement d’une discussion pour la mise en place d’un réseau de femmes défenseures des droits humains en Afrique centrale, ainsi qu’à la consultation sur l’espace civique et le renforcement des capacités pour les initiatives de plaidoyer avec la Commission africaine et les mécanismes spéciaux de l’ONU.
En réponse à des allégations de violations des droits d’activistes, le Rapporteur spécial a adressé dix appels urgents aux États. Ces allégations concernaient essentiellement des affaires de meurtre, de harcèlement judiciaire, d’arrestation et de détention arbitraires, de représailles et d’intimidation d’activistes. Cependant, rares sont les États qui ont répondu.
Il a conclu en appelant les États à enquêter sur les menaces et les actes d’intimidation à l’encontre des défenseur·e·x·s et à veiller à ce que les auteurs présumés soient traduits en justice afin de garantir le droit à la justice et à la réparation pour les victimes et les survivant·e·x·s.
Rapport sur les représailles
En réponse au rapport du Rapporteur spécial, ISHR a fait une déclaration dans laquelle l’organisation exhorte le point focal à publier son rapport, trop longtemps différé, et à s’attaquer aux lois qui restreignent l’espace civique à travers le continent.
ISHR a souligné l’avancée qu’a représentée l’extension du mandat du Rapporteur spécial en 2014 afin de couvrir les représailles en Afrique, étant donné que les cas se multipliaient et qu’aucun mécanisme adéquat n’était en place pour documenter et traiter le problème croissant des représailles.
Dans une démarche de collaboration prometteuse, le Rapporteur spécial avait publié en 2019 une note d’information qui expliquait comment interagir avec lui et avait appelé les différentes parties prenantes à soumettre leurs contributions à la préparation du premier rapport annuel.
En 2020, à la suite de cette note, ISHR avait soumis un rapport décrivant une augmentation inquiétante des actes d’intimidation et de représailles contre les membres de la société civile coopérant avec les mécanismes africains des droits humains dans plusieurs pays.
La déclaration d’ISHR appelait également le Rapporteur spécial à prendre des mesures proactives pour contrer la tendance croissante à l’adoption de lois restrictives à l’encontre des défenseur·e·x·s des droits humains dans toute l’Afrique. Cet appel fait suite à l’adoption d’un projet de loi sur le statut des organisations non gouvernementales qui limite considérablement la jouissance des libertés fondamentales et restreint l’espace civique et démocratique en Angola.
« La promulgation de la loi par l’exécutif est actuellement suspendue, néanmoins nous appelons le Rapporteur spécial à redoubler d’efforts pour encourager les autorités angolaises à adopter un texte respectant les normes internationales et régionales et à le faire en consultation avec la société civile afin que celle-ci puisse continuer à mener ses activités librement », a ajouté Trésor Makunya.
Des contributions nécessaires
Saluant les efforts déployés par ISHR s’agissant de la publication du premier rapport sur les représailles, le Rapporteur spécial a toutefois expliqué qu’il avait besoin de recevoir davantage d’informations sur les représailles en Afrique afin que son rapport rende compte de la situation dans l’ensemble des États membres de l’Union africaine. Il a regretté la réticence de plusieurs OSC à fournir des informations sur les représailles, sans doute, justement, par crainte de représailles.