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CADHP79 : Réception des commentaires sur le projet de déclaration sur les défenseur·e·x·s en Afrique

Une table ronde sur le projet de déclaration a permis de mettre en avant ses nouveautés ainsi que les différents aspects que celle-ci devrait prendre en compte, tels que les menaces émergentes qui pèsent sur les activités des défenseur·e·x·s.

Le 24 mai 2024, lors de sa 79e session ordinaire, la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples (la Commission) a organisé une table ronde sur son projet de Déclaration sur la promotion du rôle des défenseur·e·x·s des droits humains et leur protection en Afrique. Cette table ronde avait pour objectif de donner aux parties prenantes – États, organisations de la société civile et institutions nationales des droits de l’Homme – une nouvelle occasion de donner leur avis sur le projet de déclaration. La Commission avait publié le texte en janvier 2024 et avait invité les parties prenantes à faire part de leurs commentaires afin d’améliorer le texte définitif.

Prise en compte des réalités africaines

Le processus d’élaboration de la déclaration a commencé en 2019. La Commission africaine a décidé de rédiger ce document lors de sa 65e session ordinaire, qui s’est tenue à Banjul du 21 octobre au 10 novembre 2019, et a confié la tâche au Rapporteur spécial sur les défenseurs des droits de l’Homme et point focal sur les représailles en Afrique.

Le principal objectif de cette déclaration régionale est d’appliquer au niveau continental les conventions et autres normes et directives adoptées à l’échelle mondiale, notamment la Déclaration des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l’Homme de 1998, et de prendre en compte les problèmes et caractéristiques propres à l’Afrique afin de trouver des solutions appropriées pour restaurer un espace civique propice à la promotion et à la protection effective des droits humains. La logique est la même que pour les conventions internationales sur les droits humains, qui ont été dupliquées ou adaptées aux réalités de notre continent.
Rémy Ngoy Lumbu, Président de la Commission africaine, Rapporteur spécial sur les défenseurs des droits de l’Homme et point focal sur les représailles en Afrique.

Caractère unique de la déclaration

S’inspirant des instruments juridiques non contraignants déjà mis en œuvre par la Commission africaine, l’Union africaine et les Nations unies, entre autres, le projet de déclaration répond aux besoins spécifiques des défenseur·e·x·s des droits humains en Afrique. Outre son préambule, la déclaration comporte huit dispositions. Celles-ci définissent la notion de défenseur·e·x des droits humains (article 1), les droits des défenseur·e·x·s (articles 2 et 3), les obligations des États (article 4), la responsabilité en matière de défense des droits humains et des libertés fondamentales (article 5), les limitations, les normes et les mandats (article 6), l’interprétation (article 7) et la présentation de rapports (article 8).  « La déclaration met en avant l’idée que les défenseur·e·x·s doivent pouvoir exercer leurs activités sans subir de représailles. Cette question n’était pas abordée dans la Déclaration des Nations Unies de 1998 et constitue l’apport majeur de ce projet de déclaration », a déclaré Paul Mulindwa, responsable du plaidoyer et des campagnes pour l’Afrique chez CIVICUS.

Les participant·e·x·s ont constaté d’autres améliorations, notamment le fait que la déclaration s’inspire des réalités vécues par les défenseur·e·x·s sur le sol africain. « La déclaration prend en compte les particularités de l’Afrique tout en adhérant aux principes du droit international. Nous ne devons pas perdre de vue le contexte africain », a noté Pasharo Kayira, Représentant adjoint du Malawi auprès des Nations Unies à Genève. Il a également souligné l’intérêt de l’article 8, qui demande aux États de rendre compte de la manière dont ils mettent en œuvre la déclaration.

« Cette exigence s’inspire des obligations en matière de rapports prévues par les principales conventions africaines sur les droits humains et ne doit pas être considérée comme une charge supplémentaire pour les États », a-t-il ajouté.

Commentaires

Les participant·e·x·s ont fait différentes suggestions à la Commission africaine pour compléter ou clarifier le projet de déclaration et répondre aux menaces émergentes qui pèsent sur le travail des activistes. Parmi ces suggestions figuraient la nécessité d’adopter une perspective intersectionnelle et de remédier aux difficultés que rencontrent les défenseur·e·x·s les plus vulnérables comme les femmes défenseures des droits humains, les activistes qui vivent avec un handicap, les personnes qui luttent pour les droits des minorités sexuelles, contre la corruption ou contre le changement climatique, celles qui défendent l’environnement et les ressources naturelles, celles qui se battent pour obtenir justice et celles qui demandent des comptes aux entreprises. La déclaration doit également prendre en compte les violations des droits humains liées à l’usage d’Internet, à l’intelligence artificielle, aux technologies numériques, à la cybersécurité, à la protection des données et à la protection contre le cyberharcèlement. Il est important de souligner l’obligation qu’ont les États d’instaurer un environnement porteur pour les défenseur·e·x·s et d’adopter des instruments nationaux qui cadrent avec les normes internationales.

J’appelle les États à adopter, de toute urgence et en consultation avec les organisations de la société civile et les défenseur·e·x·s des droits humains, des stratégies et des dispositions juridiques pertinentes conformes à la déclaration afin de faciliter et de protéger le travail de ces organisations et individus, de s’attaquer aux causes profondes des problèmes observés et d’offrir des recours adéquats.
Gina Romero, Rapporteure spéciale de l’ONU sur le droit de réunion pacifique et la liberté d’association.

La Commission africaine rédigera une nouvelle ébauche de la déclaration en tenant compte des commentaires pertinents.

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