CADHP81 : Soutenir le travail des défenseur·e·x·s LGBTIQ+ en Côte d’Ivoire
Une réunion en marge de la 81e session de la Commission a levé le voile sur les restrictions aux activités des défenseur·e·x·s en Côte d’Ivoire,, le rétrécissement de l’espace civique et les menaces particulières qui pèsent sur les militant·e·x·s des droits des personnes LGBTIQ+.
En marge de la 81e session ordinaire de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, à Banjul, en Gambie, le Service International pour les Droits de l’Homme (sigle anglais ISHR) a coorganisé une réunion parallèle sur la situation des défenseur·e·x·s des droits humains en Côte d’Ivoire, en partenariat avec la Coalition ivoirienne des défenseurs des droits humains (CIDDH), l’International Center for Not-for-profit Law (ICNL), le Réseau panafricain des défenseurs des droits humains (AfricanDefenders) et le Réseau ouest-africain des défenseurs des droits humains (ROADDH).
En juin 2024, les autorités ivoiriennes ont publié un nouvel arrêté restrictif visant à réglementer le fonctionnement des organisations de la société civile (OSC) qui suscite de vives inquiétudes. Les participant·e·x·s ont débattu de l’interdiction faite aux OSC d’opérer de quelque manière que ce soit tant qu’elles n’ont pas été accréditées par les autorités ; des motifs excessivement nombreux et vagues sur la base desquels l’État est en droit de dissoudre une OSC, notamment les menaces et les troubles à l’ordre public, les menaces à la sécurité publique, le discrédit des institutions d’État, l’incitation à la haine ethnique ou encore l’outrage aux bonnes mœurs ; et, pour finir, de la nature administrative plutôt que judiciaire du pouvoir de dissoudre une OSC qui laisse un important pouvoir discrétionnaire à l’exécutif.
Les participant·e·x·s ont indiqué que ces mesures n’étaient pas conformes aux normes internationales en matière de liberté d’opinion, d’expression, de réunion et d’association. Elles entravent fortement les activités des défenseur·e·x·s des droits humains, malgré la législation existante censée les protéger, en place depuis 2014.
En outre, la réunion a été l’occasion d’examiner les exigences excessives en matière de rapports financiers imposées aux OSC, notamment les obligations en matière d’audit et la déclaration de l’intégralité des contributions, même pour les organisations qui ne reçoivent pas de financement public. Ce degré élevé de surveillance constitue une ingérence considérable de l’État dans la gestion administrative et financière interne de ces organisations.
La discussion a également porté sur les expériences des personnes LGBTIQ+ et des activistes qui militent pour leurs droits. Un défenseur des droits humains a livré un témoignage émouvant, racontant avoir été pris en otage et avoir reçu des menaces de mort. Il a également souligné l’effet délétère de la campagne « Zéro woubi ». Les participant·e·x·s ont également noté que les OSC qui se consacraient à la défense des droits des personnes LGBTIQ+ se voyaient systématiquement refuser la reconnaissance légale, leur domaine d’activité étant considéré comme tabou par la société ivoirienne. Il est donc de plus en plus difficile pour ces organisations de fonctionner.
L’événement s’est conclu par une discussion animée entre les participant·e·x·s au sujet des contradictions entre les mesures actuelles de protection des droits humains et le nouvel arrêté, la possibilité d’un recours juridique pour contester cet arrêté et l’absence d’enquêtes sur la montée de la violence homophobe. Les personnes présentes ont rappelé à quel point il était important que toutes les causes relatives aux droits humains bénéficient d’un soutien public, sans discrimination.
Lors de la 81e session ordinaire de la Commission, la situation des défenseur·e·x·s des droits humains en Côte d’Ivoire et le cas particulier des personnes LGBTIQ+ ont également été évoqués en séance plénière par le Président de la Commission Africaine, M. Rémy Ngoy Lumbu, qui est également Rapporteur spécial sur les défenseurs des droits de l’Homme en Afrique et Rapporteur pour la Côte d’Ivoire.