Atelier stratégique
Le Comité de Protection des Défenseurs des Droits de l’homme de Côte d’Ivoire (Comité) et ISHR ont co-organisé un atelier stratégique de deux jours du 5 au 6 juin 2024 à Abidjan, Côte d’Ivoire. Un total de 11 participant.e.x.s, dont les cinq membres du Comité, deux assistants techniques et deux membres de la Coalition Ivoirienne des Défenseurs des Droits Humains (CIDDH), ont assisté à l’atelier. L’objectif était d’examiner et de faire le point sur le cadre juridique relatif à la protection des défenseur.e.x.s des droits humains afin de s’assurer que le Comité fonctionne efficacement conformément à son mandat et aux meilleures normes internationales en matière de droits de l’homme. La Côte d’Ivoire a été le premier pays à adopter une loi nationale protégeant les défenseur.e.x.s des droits humains en 2014, complétée par un décret d’application et un arrêté interministériel créant le Comité. Ces efforts normatifs ont abouti à la nomination en mars 2022 des cinq membres composant le Comité, dans le but de fournir aux défenseur.e.x.s des droits humains un autre rempart institutionnel contre les violations de leurs droits. ISHR a co-organisé deux ateliers similaires au Burkina Faso et au Mali dans le cadre de ses efforts pour renforcer la protection juridique des défenseur.e.x.s des droits humains en Afrique.
Le Comité
Un arrêté interministériel a créé le Comité en novembre 2021 et lui a confié six missions spécifiques visant à améliorer la situation des défenseur.e.x.s des droits humains. Le Comité vise notamment à faciliter le travail des défenseur.e.x.s des droits humains et leur accès aux centres de détention, à assurer la confidentialité de leurs sources d’information et à protéger les défenseur.e.x.s des droits humains et leurs familles contre les risques et les dangers. Il peut également proposer et assurer la mise en œuvre de mesures de prévention et de protection permettant aux défenseur.e.x.s d’exercer pleinement leurs activités. Le Comité est composé de cinq membres issus respectivement du ministère des droits humains, de la justice, de la sécurité, de la défense et du Conseil national des droits de l’homme. Contrairement au Burkina Faso et au Mali, la société civile n’est pas représentée au sein du Comité. Plusieurs défenseur.e.x.s des droits humains estiment que leur manque de représentation dans un mécanisme censé défendre leurs droits peut affaiblir la capacité du Comité à agir pour la défense de leurs droits et à obtenir des informations de la part d’individus qui s’engagent quotidiennement dans les questions relatives aux défenseur.e.x.s des droits humains. D’autant plus que le décret interministériel n’exige pas que les personnes nommées au Comité soient familiarisées avec les questions relatives aux défenseur.e.x.s des droits humains ou avec les normes en matière de droits humains. D’autres discussions ont porté sur l’indépendance du comité. La composition du Comité, centrée sur des entités étatiques, donne aux défenseur.e.x.s l’impression que ses membres peuvent avoir des difficultés à agir lorsque des allégations de violations des droits des défenseur.e.x.s des droits humains impliquent de hauts fonctionnaires de l’État. Le Comité ne dispose pas de son propre budget et doit compter sur les allocations budgétaires de la direction des droits de l’homme, même si elles sont insuffisantes, pour mener à bien ses activités. Néanmoins, sa volonté de s’associer à des OSC, dont la CIDDH, et de collecter des fonds peut permettre de résoudre ce problème.
Vers un Comité efficace
Le Comité reste inconnu de plusieurs défenseur.e.x.s des droits humains et n’a pas mené beaucoup d’activités. Son âge relativement jeune et le manque d’activités de sensibilisation ciblant les principaux acteurs des droits de l’homme peuvent expliquer cette situation.
Comme précédemment indiqué, le manque d’OSC dans ses rangs pourrait avoir démotivé certaines OSC à collaborer de manière significative avec le Comité. Malgré ces lacunes, le Comité a réagi dans quatre cas d’allégations de violations des droits des défenseur.e.x.s des droits humains lorsque les victimes l’ont saisi. En tenant compte des faiblesses et des menaces qui pèsent sur le Comité et en s’appuyant sur ses forces et ses opportunités, les participant.e.x.s à l’atelier ont élaboré un plan d’action visant à rendre le Comité plus efficace. Ce plan s’articule autour de quatre piliers : a) sensibiliser le public sur le Comité, à son rôle et à ses fonctions ; b) renforcer les relations du Comité avec les OSC et d’autres acteurs clés ; c) former les acteurs clés, y compris les défenseur.e.x.s des droits humains et les autorités publiques, au cadre juridique de la protection des défenseur.e.x.s des droits humains ; et d) lever les fonds pour les activités du Comité. Les activités qui rendront le Comité plus efficace comprennent le développement d’un plan de communication et d’autres matériels de sensibilisation, la formalisation d’un partenariat avec le CIDDH et la recherche d’un soutien budgétaire supplémentaire de la part du ministère du budget. “Les discussions nous ont permis de progresser sur de nombreux points. La mise en œuvre de certains points prendra du temps. Chacun d’entre nous fera ce qui lui semble bon pour faire avancer les choses”, a déclaré Constant Delbe, président du Comité. En attendant, le Comité a convenu d’associer, si nécessaire, la CIDDH à ses réunions régulières.