Suisse | L'ONU obtient la suspension du renvoi de Flor Calfunao Paillalef

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Petit soupir de soulagement après des semaines d'angoisse: le renvoi de la militante Mapuche Flor Calfunao Paillalef a été suspendu par le Comité des Nations Unies contre la Torture. 

Suite à une décision du Comité des Nations Unies contre la torture (sigle anglais CAT) datant du 23 août dernier, les autorités suisses se sont engagées à ne pas procéder à l’expulsion de Flor, tant que le Comité n’aura pas fini d’examiner la plainte déposée par la défenseure. Une telle procédure pouvant prendre plusieurs mois, celle-ci reste donc en sursis pour quelques temps.

Bien que temporaire, la décision impulsée par le CAT demeure un “soulagement” pour Flor. “J’avais beaucoup d’espoir dans le Comité (contre la Torture) et je ne suis pas déçue. S’ils ont pris cette mesure, c’est que la décision (des autorités suisses) leur est apparue problématique”, confie Flor à ISHR. En effet, afin de justifier sa décision de renvoyer Flor au Chili, le Service d’Etat suisse aux Migrations (SEM) avait argué que les exactions visant les Mapuche étaient circonscrites à une seule région, l’Auracanie, où vit ce peuple. Il aurait donc suffi à Flor, selon l’argumentaire du SEM, de s’installer dans une autre région pour être en sécurité. Une perspective inenvisageable pour Flor dont l’intégrité physique et psychique serait menacée au Chili et qui, en plus d’être éloignée des siens, aurait perdu tout moyen de poursuivre son travail de défense des droits de son peuple.

Malgré la mesure adoptée par le CAT, les autorités suisses peuvent encore décider de renvoyer la défenseure au Chili, pays qu’elle a fui en 1996 car les Mapuche, son peuple, y sont la cible d’exactions de toutes sortes: arrestations et détentions arbitraires, harcèlement judiciaire, pillages, voire assassinats. Plusieurs membres de la famille de Flor font ainsi l’objet de mesures de protection de la part de la Commission Interaméricaine des droits de l’Homme, compte tenu des nombreuses attaques dont ils/elles ont été victimes à cause de leur activité de défense de leur peuple et de leur territoire ancestral. 

A ce titre, son seul espoir de poursuivre son travail repose sur l’ONU. “Si je suis là c’est grâce à l’ONU. Oui c’est lent, mais c’est la seule voie que je peux emprunter vu que je n’ai plus aucun recours au Chili”, lance Flor. Et en Suisse non plus, étant donné que la défenseure y a épuisé toutes les voies de recours internes. Disposant d’un mécanisme de plaintes permettant à toute personne victime ou témoin de cas de torture de présenter un recours, le CAT peut en effet demander au pays concerné d’adopter des mesures provisoires pendant qu’il enquête sur les faits exposés. Une démarche qu’il adopte en général quand il estime disposer d’assez d’éléments justifiant une enquête de sa part. 

“La Suisse est une terre de refuge pour beaucoup de militantes et militants des droits humains, et plus généralement pour les victimes de persécution” rappelle Vincent Ploton d’ISHR.  “En tant qu’Etat hôte du Haut-Commissariat et du Conseil des droits de l’Homme, il est capital que les mesures adoptées par des institutions comme le Comité contre la torture y soient respectées”, ajoute t-il.

Rappelons que Flor est la seule personne à représenter et porter les préoccupations de son peuple auprès du Conseil et autres instances des droits de l’Homme. Son renvoi au Chili mettrait un terme au lien privilégié entre les Mapuche et les Nations Unies.

 

Photo: Mission Permanente Mapuche auprès de l’ONU

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