En juin 2020, après le meurtre de George Floyd et à la demande de familles de victimes de violences policières afro-américaines, puis du Groupe Africain, le Conseil des droits de l’Homme avait tenu un débat urgent demandant une enquête internationale sur les violences policières contre les afrodescendant.es aux Etats-Unis et ailleurs. A la suite de ce débat, le Conseil avait chargé la Haute-Commissaire aux droits de l’Homme de rédiger un rapport sur le racisme systémique, les violations des droits humains des Africain.es et des afrodescendant.es par les forces de l’ordre aux Etats-Unis et ailleurs, ainsi que sur la réponse apportée par les Etats aux manifestations contre les violences policières.
En août dernier, 144 familles de victimes de violences policières et plus de 360 organisations de la société civile, dont ISHR, avaient invité la Haute-Commissaire à centrer son rapport sur les vies et les expériences des personnes d’ascendance africaine. A cet effet, lui rappelaient-elles, la Haute-Commissaire se devait d’inclure réellement les personnes d’ascendance africaine et les organisations les représentant, dans le processus d’élaboration de ce rapport, se mettre à l’écoute de leurs préoccupations et contributions, et en prendre dûment compte dans son rapport. De son côté, dès le mois de juin, ISHR a pris l’engagement public de soutenir les défenseur.es des droits humains luttant contre les violences policières et le racisme systémique.
Ainsi, en réponse à l’appel à contributions lancé par la Haute-Commissaire en vue de l’élaboration de son rapport, ISHR a préparé un rapport conjoint avec le Comité Adama, basé en France, et l’association « A Qui Le Tour ? », basée en Suisse. Ce rapport attire l’attention de la Haute-Commissaire sur deux cas de violences policières ayant entraîné la mort d’hommes Noirs, celle d’Adama Traoré en France en 2016, et celle de Mike Ben Peter en Suisse en 2018. Ceci afin notamment de rappeler que les violences policières à caractère raciste et les dysfonctionnements judiciaires qui les accompagnent fréquemment sont un phénomène global affectant aussi les pays francophones. Le rapport a également bénéficié de la contribution de la famille de Mike Ben Peter, représentée par Me Simon Ntah.
Tant la France que la Suisse y sont invitées à, entre autres, interdire la pratique du plaquage ventral, cause de la mort des deux victimes mentionnées et de nombreuses autres victimes de violences policières. Il y est également exigé de ces deux pays qu’ils assurent des enquêtes diligentes, transparentes et impartiales pour tout cas de décès ou blessure grave aux mains de la police. En effet, dans les deux cas mentionnés, aucune mise en examen n’a été prononcée, les expertises commandées par les autorités ne cessent de s’avérer erronées, et les procès se font encore attendre. Enfin, il est demandé aux deux pays d’accepter les visites de la Rapporteure spéciale de l’ONU sur le racisme ainsi que du Groupe de Travail de l’ONU sur les personnes d’ascendance africaine. Il est, en outre spécifiquement demandé à la France, membre du Conseil des droits de l’Homme, de ne pas entraver le travail des défenseur.es des droits humains luttant contre les violences policières. Ce rapport fait ainsi écho à des recommandations adressées précédemment, notamment lors de la 45ème session du Conseil des droits de l’Homme, par les sociétés civiles de France et de Suisse, ainsi que par ISHR.
Nous espérons que la Haute-Commissaire saura prendre compte des informations contenues dans ce rapport et inviter les Etats concernés à prendre les mesures nécessaires y relatives pour assurer un accès à la justice et à la vérité aux victimes et leurs familles. Nous réitérons également notre appel à tous les Etats et au Conseil des droits de l’Homme à établir une commission d’enquête sur les violences policières et le racisme systémique à l’encontre des Africain.es et personnes d’ascendance africaine aux Etats-Unis et dans le reste du monde[1] tel que demandé par le Groupe Africain et les Procédures spéciales lors du débat urgent au Conseil des droits de l’Homme de juin dernier.
Photo: Flickr/Jeanne Menjoulet