Screenshot of ACHPR Live Stream

Burkina Faso
Afrique
Nouvelles

CADHP81 : Le Burkina Faso doit mettre fin à l’enrôlement forcé et aux enlèvements de défenseur·e·x·s des droits humains

Lors de l’examen du rapport périodique du Burkina Faso par la Commission Africaine, ISHR a noté avec inquiétude une augmentation des cas d’arrestation, d’enrôlement et d’enlèvement de personnes militant pour les droits humains, dont certaines sont directement envoyées au combat.

Le 23 octobre, le Burkina Faso a présenté son rapport périodique sur la mise en œuvre de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples et du Protocole à la Charte Africaine sur les droits des femmes en Afrique (Protocole de Maputo) couvrant la période 2015-2021.

Ce rapport présente les mesures juridiques, administratives, judiciaires et autres que l’État a adoptées en vertu de l’article 62 de la Charte Africaine et de l’article 26 du Protocole de Maputo afin de donner pleinement effet aux droits que ces instruments consacrent. Il a été présenté dans un contexte politique particulier : depuis 2022, le pays est soumis à un régime militaire et la date de rétablissement d’un gouvernement civil demeure incertaine, la période de transition ayant été prolongée de cinq ans.

Le sort des défenseur·e·x·s

Dans un rapport présenté à la Commission Africaine, ISHR fait état de violations en série des droits des défenseur·e·x·s par le gouvernement militaire et ce, en dépit de l’adoption d’une loi protégeant les défenseur·e·x·s en 2017 et de l’établissement d’un mécanisme national de protection en 2020.

Les défenseur·e·x·s des droits humains burkinabè font l’objet d’arrestations arbitraires ou d’enrôlement dans les forces de défense nationale. Ces manœuvres visent à étouffer les critiques à l’égard du régime militaire en place et à créer un environnement défavorable à la défense et à la promotion des droits fondamentaux.

En mars 2024, l’État burkinabé a reconnu retenir en détention Guy-Hervé Kam, membre éminent du barreau et fondateur du mouvement Balai citoyen, pour « atteinte à la sûreté de l’État ». Cet aveu est intervenu alors que Guy-Hervé Kam était détenu au secret depuis six semaines, sans accès à sa famille ni à ses avocats, en violation de ses droits fondamentaux.

Le rapport d’ISHR indique également qu’au Burkina Faso, la peur, la circonspection et l’autocensure entravent les activités de promotion et de défense des droits humains menées par les défenseur·e·x·s, qui craignent pour leur sécurité et leur vie. Ce climat délétère est instauré à dessein par le régime en place.

Un défenseur a notamment indiqué que son organisation était sous surveillance et que l’un de ses membres avait été enrôlé de force pour aller combattre, à l’instar de plusieurs autres acteurs judiciaires. La procédure d’enrôlement n’est pas toujours transparente et les mécanismes de recours contre les décisions d’enrôlement sont inefficaces et ne bénéficient pas à tout le monde.

En outre, l’institution de zones d’intérêt militaire (lien en anglais) limite considérablement les déplacements des défenseur·e·x·s et entrave leurs activités dans ces zones, où de nombreuses violations des droits humains sont pourtant signalées.

Réponses du gouvernement

En réponse à ces allégations, la délégation de l’État a fait valoir les menaces de sécurité et de terrorisme auxquelles le pays est confronté et qui, non seulement, rendent difficile la tenue d’élections libres et équitables, mais l’ont également incité à adopter des décrets sur la conscription des citoyens.

Les délégué·e·x·s ont également rétorqué qu’il existait des recours juridiques contre les ordres d’appel et que les individus pouvaient s’adresser aux tribunaux et aux autorités administratives pour les contester.

La Charte Africaine autorise uniquement les restrictions des droits humains qui sont nécessaires et proportionnées à l’objectif visé. Le fait d’enrôler à dessein les défenseur·e·x·s ou les opposant·e·x·s au régime témoigne clairement d’une volonté de les réduire au silence quand bien même leurs droits sont protégés par la loi. De même, le fait de détenir des défenseur·e·x·s au secret, sans droit de visite ou accès à une aide juridique, est contraire à la Charte Africaine.
Trésor Makunya, juriste et chargé de plaidoyer pour l’Afrique auprès d’ISHR

Related articles