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© Yettesu / ISHR

Demandez à la Chine de libérer les défenseur.es et d'abroger la RSDL

ISHR, Safeguard Defenders, The Rights Practice et The 29 Principles mobilisent la communauté internationale pour faire pression sur la Chine afin d'abroger la RSDL et de mettre fin aux disparitions forcées de défenseur.es des droits humains.
Rejoignez notre campagne !

En Chine, de courageux·ses militant·e·s des droits humains tentent d’améliorer la vie quotidienne de leurs concitoyen.nes et de défendre leurs droits de s’exprimer librement, d’être traité.es sur un pied d’égalité, de manifester pacifiquement ou de pratiquer une religion. Mais le gouvernement chinois craint que leurs actions ne remettent en cause son pouvoir et que leurs critiques ne l’ébranlent. Comme les peuples ouïghour et tibétain, beaucoup de celles et ceux qui défendent les droits humains sont réprimé.es et réduit.es au silence, et les autorités ont trouvé un moyen très efficace d’y parvenir : elles les font disparaître.

Depuis 2012, l’organe législatif chinois a adopté et modifié plusieurs articles de son Code de procédure pénale qui donne à la police les pouvoirs de faire disparaître n’importe qui dans un lieu secret: cette pratique se dénomme la “surveillance résidentielle dans un lieu désigné”, mieux connue sous son sigle en anglais “RSDL” (“Residential Surveillance at a Designated Location”). Lorsqu’elles sont placées sous RSDL, les personnes sont privées de tout contact avec le monde extérieur, même avec leur famille ou un. avocat.e, pendant une période pouvant aller jusqu’à six mois. Nul ne sait où elles se trouvent. Elles sont interrogées et souvent torturées pour leur extorquer des aveux. Pendant ce temps, malgré les obstacles et les risques qu’elles doivent surmonter, leurs familles persistent à chercher à connaître le sort de leurs proches et à obtenir justice pour ce qu’elles ont subi.

Les expert·es des Nations Unies sont clair·es : la RSDL est une forme de disparition forcée. Avec des estimations allant jusqu’à 57 000 personnes sous RSDL, les disparitions forcées sont endémiques en Chine. La RSDL déchire les familles et a pour but d’inspirer la peur au mouvement des droits de l’homme en Chine.

De nombreux militant.es des droits humains ont cessé de promouvoir la dignité, la paix et la justice au sein de leurs communautés, car ils et elles craignent de disparaître aux mains de la police. Cette pratique – la disparition forcée – est absolument condamnable et interdite par le droit international. Chacun·e doit pouvoir s’exprimer et participer à la vie de sa communauté. 

 

Que voulons-nous ? 

Nous voulons que le gouvernement chinois abroge la RSDL (article 75 du Code de procédure pénale chinois), et qu’il apporte vérité et justice aux victimes.

La RSDL devrait être une priorité à l’ordre du jour de tout échange sur les droits humains avec le gouvernement chinois. Nous voulons que les gouvernements du monde entier s’expriment publiquement et utilisent tous les canaux bilatéraux et multilatéraux pour faire pression sur le gouvernement chinois afin qu’il abroge la RSDL. Nous voulons que l’ONU renforce son suivi de la RSDL en Chine et maintienne sa pression sur les autorités pour qu’elles respectent le droit international et abrogent la RSDL.

Se sentir soutenu est vital pour les défenseur.es des droits humains disparu.es et leurs proches. Nous voulons que journalistes, organisations de défense des droits humains et militant.es du monde entier accordent une plus grande attention à la RSDL et se solidarisent des défenseur.es disparu.es et de leurs proches.

Comment y parvenir ? 

Nous travaillons pour :

  • Sensibiliser et renforcer la compréhension juridique des gouvernements et diplomates, expert.es de l’ONU, journalistes et ONG sur la RSDL en tant que forme de disparition forcée, interdite par le droit international. Nous avons créé un bref document explicatif qui détaille clairement les préoccupations des expert.es de l’ONU, et le diffusons en ligne et hors ligne ;
  • Mobiliser les missions diplomatiques, par le biais de réunions et de lettres, et les encourager à se prononcer sur la RSDL à l’ONU et dans d’autres espaces bilatéraux et multilatéraux ;
  • Inciter les expert.es de l’ONU à se saisir de plus de cas individuels et à examiner de plus près l’utilisation et l’impact de la RSDL quant aux obligations de la Chine au regard du droit international des droits humains ;
  • Encourager gouvernements, militant.es et citoyen.es engagé.es du monde entier à être solidaires des défenseur.es des droits humains disparu.es et de leurs proches.

 

Que pouvez-vous faire ? 

Nous soutenons deux cas de défenseurs des droits humains chinois qui sont ou ont été portés disparus dans le cadre de la RSDL. Votre action peut faire la différence. Agissez pour eux maintenant !

Ding Jiaxi

Ding Jiaxi est un éminent militant des droits de l'homme et avocat chinois. En décembre 2019, les autorités l'ont fait disparaître dans le cadre du système chinois RSDL. Pendant 6 mois, personne n'a su où était Ding ni ce qui s'était passé. Selon son témoignage, la police l'a torturé pendant sa détention. En juin 2020, il est réapparu dans la ville de Linyi, où il a été officiellement placé en détention, puis accusé de "subversion du pouvoir de l'État". Ce n'est qu'alors qu'il a été autorisé à voir un avocat. Cependant, son avocat n'a pas été en mesure d'avoir un accès complet aux dossiers de l'affaire ni de le rencontrer librement. Ding n'a pas été autorisé à voir ou à parler à ses proches depuis 2019. Ses conditions de détention sont très mauvaises et sa santé se détériore. Son procès a été reporté à plusieurs reprises sans raisons claires. Ding pourrait être jugé en secret à tout moment. Nous demandons aux autorités chinoises de veiller à ce que son procès soit équitable et conforme aux normes internationales et de le libérer sans délai.

Chang Weiping

Le 22 octobre 2020, il y a un an, l'avocat Chang Weiping disparaissait sous "surveillance résidentielle dans un lieu désigné" (RSDL) pour "incitation à la subversion du pouvoir de l'État". Chang est un avocate des droits humains, qui n'a pas eu peur de représenter des cas "sensibles" de victimes de harcèlement sexuel pendant la période "MeToo" en Chine. Il a travaillé avec des victimes de pratiques discriminatoires fondées sur le genre ou l'orientation sexuelle, ou qui ont été ciblées pour avoir parlé librement ou pratiqué leur religion. Dix jours avant son arrestation, il avait publié une vidéo dénonçant les tortures qu'il avait subies lorsqu'il avait été brièvement détenu en vertu de la RSDL en janvier 2020, après avoir participé à une réunion avec d'autres militants un mois plus tôt. Les expert·es de l'ONU ont publiquement appelé à sa libération. Personne ne sait où il est détenu. Envoyez un message de solidarité à Chen Zijuan, l'épouse de l'avocat Chang Weiping : écrivez une carte postale et partagez-la sur vos médias sociaux. N'hésitez pas à le personnaliser avant de le tweeter.

Yu Wensheng

VICTOIRE! Lauréat du prix Martin Ennals 2021, Yu Wensheng est une figure de proue parmi les avocats spécialisés dans les droits humains en Chine. Il s'est attaqué sans crainte à un certain nombre d'affaires et de questions sensibles, rejoignant le contentieux de la pollution de l'air et plaidant pour un gouvernement constitutionnel. En conséquence, les autorités ont révoqué sa licence légale le 16 janvier 2018. Trois jours plus tard, il a disparu de force, un jour après avoir publié une lettre ouverte appelant à une réforme constitutionnelle. Détenu en vertu de la RSDL, il a été jugé en secret le 9 mai 2019. Sa femme, Xu Yan, n'a été informée de sa condamnation à quatre ans de prison qu'en juin 2020. Après une forte pression de la société civile internationale, Yu Wensheng a été libéré de la prison de Nanjing le 1er mars 2022 et a retrouvé sa famille à Pékin après avoir purgé sa peine pour "incitation à la subversion du pouvoir de l'État".

Vous pouvez aussi sensibiliser autour de vous ! Consultez le matériel d’information et de communication de notre “Boîte à Outils de Campagne” et partagez-le avec le ministère des affaires étrangères de votre pays, un.e journaliste que vous connaissez, vos ami.es ou vos followers – et n’oubliez pas de mentionner @ISHR_fr et #StandWithDefenders #RepealRSDL .

Kit de Campagne

Kit de Campagne

Téléchargez notre kit de campagne pour comprendre en un coup d'œil pourquoi la RSDL est une grave violation des droits humains, et pour nous aider à sensibiliser votre entourage (un·e ami·e, un·e journaliste que vous connaissez, vos followers sur les médias sociaux) à cette importante question.

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RSD....Quoi?

Tout ce que vous devez savoir sur la "surveillance résidentielle dans un lieu désigné", mieux connue sous son sigle en anglais "RSDL" ("Residential Surveillance at a Designated Location").

En 2012, la Chine a modifié son Code de procédure pénale, en incluant une nouvelle disposition à l’article 73 qui autorise une pratique dénommée“surveillance résidentielle dans un lieu désigné”, mieux connue sous son sigle en anglais “RSDL” (“Residential Surveillance at a Designated Location”).

Cette disposition autorisait la détention d’une personne – avant son arrestation formelle – jusqu’à 6 mois dans n’importe quel lieu ou bâtiment choisi par la police, sans qu’il soit nécessaire de divulguer ce lieu, et avec des procédures et possibilités de contrôle judiciaire très limitées.

Pour de nombreux juristes, cette disposition n’a fait que légaliser une pratique existante d’interrogatoires de police dans des lieux “illégaux” (hôtels, restaurants, bâtiments abandonnés, etc.) : en lui donnant un semblant de légalité, toute information obtenue dans ces lieux pourrait désormais être utilisée devant un tribunal. Cependant, le fait de l’inscrire dans le droit national chinois ne signifie pas que cela soit légal au regard du droit international !

Selon les normes internationales en matière de droits humains, et comme l’ont déclaré à plusieurs reprises des expert.es indépendant.es de l’ONU : détenir des personnes au secret + pour une enquête + pendant des périodes prolongées + sans révéler le lieu où elles se trouvent = détention secrète = une forme de disparition forcée.

En bref : la RSDL est une forme de disparition forcée. Et selon toutes les sources du droit international, la disparition forcée est une grave violation des droits humains interdite en toutes circonstances.

Selon Safeguards Defenders :

  • Jusqu’à 57 000 personnes auraient été placées sous RSDL entre 2013 et 2020
  • Il y a une forte augmentation de l’utilisation de la RSDL depuis 2016, dont un pic en 2020 avec une augmentation de 136% par rapport à 2019
  • Bien que toutes ces personnes ne soient pas des défenseur.es des droits humains, il est reconnu qu’il s’agit d’une tactique utilisée pour intimider et contraindre les personnes détenues du fait de leur travail en faveur des droits humains

En août 2018, un groupe de 10 expert.es en droits humains de l’ONU a écrit une longue lettre au gouvernement chinois afin d’obtenir plus d’informations sur les dispositions légales autorisant la RSDL. Ils avaient reçu des informations selon lesquelles l’organe législatif chinois, le Congrès national du peuple, allait modifier le Code de procédure pénale, et des groupes de la société civile et avocat.es chinois.es étaient très préoccupé.es par l’article 73 autorisant la RSDL. Les expert.es ont étudié la loi dans son ensemble – en particulier l’article 73 – et ont expliqué en quoi elle n’était pas conforme avec le droit international, notamment les traités relatifs aux droits humains que la Chine a elle-même ratifiés.

Sur la base des informations reçues, de leur connaissance de la situation en Chine et de leur expertise en matière de standards internationaux en droits humains, les expert.es de l’ONU ont tiré une série de conclusions claires sur la RSDL, tant dans sa définition juridique que dans son utilisation pratique. Ils affirment que la RSDL :

  • dénie [aux personnes détenues sous RSDL] le droit fondamental à un procès équitable, porte potentiellement atteinte au droit à l’intégrité physique et mentale, et prive les personnes détenues dans ces conditions de leurs droits à un avocat et à des visites familiales
  • donne trop de pouvoir à la police et à la sécurité publique, qui en abusent pour procéder à des arrestations arbitraires
  • est utilisée pour museler les droits pacifiques et légitimes à la liberté d’expression, de réunion, d’association et de défense des droits

En bref: en promulguant et en utilisant la RSDL, la Chine ne respecte pas ses obligations juridiques contraignantes en matière de droits humains.

Dans une déclaration publique de mars 2020, un groupe d’expert.es indépendant.es de l’ONU, dont le Groupe de travail des Nations Unies sur les disparitions forcées ou involontaires, “a exprimé son inquiétude face à l’utilisation continue de la RSDL en Chine, bien qu’il ait réitéré depuis de nombreuses années que la RSDL n’est pas compatible avec le droit international des droits humains. En tant que forme de disparition forcée, la RSDL permet aux autorités de contourner les procédures ordinaires prévues par le droit pénal et de détenir des personnes dans un lieu tenu secret pendant une période pouvant aller jusqu’à six mois, sans procès ni accès à un avocat. Les individus sont ainsi exposés à un risque accru de torture, de peines ou de traitements inhumains ou dégradants”.

Dans un avis juridique de septembre 2021 sur les cas de Zhang Zhan, Chen Mei et Cai Wei, un autre groupe d’expert·es indépendants de l’ONU – le Groupe de travail sur la détention arbitraire (WGAD) – “appelle le gouvernement à abroger les dispositions régissant la RSDL”. Ils rappellent les préoccupations qu’ils ont exprimées à plusieurs reprises avec d’autres expert·es de l’ONU, à savoir que la RSDL :

  • est une forme de disparition forcée
  • contrevient au droit de toute personne de ne pas être arbitrairement privée de sa liberté, de contester sans délai la légalité de sa détention devant un tribunal, ainsi qu’au droit de l’accusé de se défendre par l’intermédiaire de l’avocat de son choix “.
  • peut en soi constituer une peine ou un traitement cruel, inhumain ou dégradant, voire une torture, et peut en outre exposer [les personnes détenues en vertu de la RSDL] à un risque accru de nouveaux abus, y compris d’actes de torture”.
  • est “utilisée pour restreindre l’exercice des droits à la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association des défenseurs des droits de l’homme et de leurs avocats“.

Dans son rapport annuel 2021, le WGEID a noté que le gouvernement chinois n’a toujours pas – après plus de sept ans – répondu positivement à leur demande de visite dans le pays ; dans le même temps, le nombre de cas de disparitions forcées en suspens pris en charge par le groupe de travail a augmenté de plus de 40 % entre les périodes de rapport 2018 et 2019, passant de 68 à 98.

Lors de l’examen de la Chine par le Comité contre la torture (CAT) en 2015, le Comité avait exprimé sa “grave préoccupation” au sujet de la RSDL et recommandé à la Chine :

  • ” abroger, de toute urgence, les dispositions de la loi de procédure pénale qui permettent la [RSDL] “, et ” en attendant “,
  • “veiller à ce que les parquets examinent sans délai toutes les décisions relatives à la [RSDL]”, “veiller à ce que les détenus désignés pour d’éventuelles poursuites soient inculpés et jugés dès que possible et que ceux qui ne doivent pas être inculpés ou jugés soient libérés immédiatement”, et “veiller à ce que “si la détention est en cours d’ordonnance, les détenus soient libérés immédiatement”.
  • veiller à ce que “si la détention est justifiée, les détenus soient officiellement comptabilisés et placés dans des lieux de détention officiellement reconnus”.
  • veiller à ce que “les fonctionnaires responsables d’abus à l’encontre des détenus soient tenus pénalement responsables”.

Le CAT est le comité d’expert·es indépendant·es chargé·es d’examiner la mise en œuvre de la Convention contre la torture par les pays. IL attend toujours le rapport périodique du gouvernement chinois, prévu le 9 décembre 2019, pour reprendre son examen de la Chine.

  • 57000

    personnes placées sous RSDL entre 2013 et 2020 (estimation).

  • 6

    mois: la durée maximale (et souvent moyenne) pendant laquelle la police peut placer une personne sous RSDL.

  • 2

    gouvernements ont recommandé publiquement à la Chine d'abroger la RSDL, lors de l'examen en droits humains EPU de la Chine à l'ONU en 2018 : l'Allemagne et la Suisse.

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