En amont de la 66ème session ordinaire de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (la « Commission Africaine »), ISHR a soumis des rapports parallèles concernant l’examen du Cameroun et du Niger. L’examen de ces deux pays devait initialement prendre place lors de la 66ème session, mais seuls les rapports de Maurice ont finalement été passés en revue.
Les 24 et 27 juillet 2020, conformément à l’article 62 de la Charte Africaine, la Commission Africaine a examiné les 9ème et 10ème rapports combinés de Maurice concernant les mesures législatives ou autres prises par le pays pour donner effet aux droits et libertés reconnus et garantis par la Charte Africaine.
Lors de la présentation du rapport de Maurice, le ministre des Affaires étrangères, M. Nando Bodha, a détaillé les mesures prises par son pays pour mettre en œuvre les observations formulées par la Commission Africaine lors du dernier examen du pays en 2017. Dans le contexte actuel de la pandémie, il a également présenté en détail certaines des mesures prises pour lutter contre la propagation du virus et apporter un soutien économique aux ménages. Il a par ailleurs indiqué que la pandémie avait retardé la pleine mise en œuvre des mesures prévues et l’adoption de lois dont l’élaboration était déjà bien avancée au moment de l’entrée en vigueur des mesures de confinement. Il s’agit notamment d’un projet de loi pour l’enfance et de lois relatives à la justice pour mineurs visant à harmoniser la législation pour la protection de l’enfance avec les obligations régionales et internationales.
Depuis 2017, Maurice a pris des dispositions pour la ratification du Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples relatif aux droits des personnes âgées en Afrique et du Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples relatif aux droits des personnes handicapées en Afrique. Concernant ce dernier Protocole, l’État a même levé deux des trois réserves qu’il avait initialement émises. Il a toutefois réaffirmé sa réticence à ratifier la Convention de Kampala (Convention de l’Union Africaine sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique) tout en rappelant son attachement au principe de non-refoulement et sa volonté de continuer à appliquer les points essentiels de la Convention internationale sur les travailleurs migrants au besoin. À cet égard, Maurice a adopté sa première politique de migration en juin 2018.
À la suite de la présentation du rapport de Maurice par son gouvernement, les commissaires ont pu poser de nouvelles questions, en complément de celles déjà posées dans les observations générales et questions sur les 9ème et 10ème rapports périodiques combinés de la République de Maurice. Émanant notamment du Rapporteur spécial sur les défenseurs des droits de l’Homme, ces questions concernaient les mesures prises pour modifier la loi exigeant l’obtention d’une autorisation pour organiser une réunion pacifique de plus de 11 personnes et assurer la promotion des Directives sur la liberté d’association et de réunion en Afrique auprès de toutes les parties prenantes du pays. Le Rapporteur spécial a par ailleurs évoqué le fait que depuis 2014, trois pays africains — la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso et le Mali — avaient adopté des lois et politiques visant à promouvoir et protéger les défenseur.es à l’échelon national, demandant si l’État de Maurice prévoyait lui aussi de renforcer la protection des défenseur.es sur son sol. Le gouvernement a pris note de cette information et indiqué qu’il évaluerait la situation à l’échelon national afin d’apporter des réponses pertinentes.
Maurice a déclaré qu’elle demeurait résolue à mettre en œuvre les observations de la Commission adoptées en 2017 et attendait avec intérêt d’en recevoir de nouvelles dans un avenir proche.
Le Président de la Commission Africaine a conclu en félicitant Maurice pour ses efforts en vue de garantir les droits inscrits dans la Charte Africaine et en soulignant que le pays pourrait devenir un exemple en Afrique en matière d’application de cette Charte s’il continuait d’œuvrer en faveur de la ratification et de la mise en œuvre de toutes les conventions des droits humains de l’Union Africaine.
En dépit des difficultés engendrées par la propagation de la COVID-19 en Afrique, la Commission Africaine est parvenue à mener à bien l’examen de Maurice, montrant sa détermination à poursuivre ses travaux. Alors que les pays du monde entier luttent pour protéger leurs populations, elle réaffirme ainsi que les droits humains doivent rester au cœur des intérêts de chaque État.
Contact : Adélaïde Etong Kame, responsable du programme pour l’Afrique, [email protected]
Photo: ISHR